Nommé dans la catégorie du meilleur film international pour Close aux Oscars, le réalisateur Lukas Dhont est aujourd’hui à Los Angeles. Peu de temps avant son départ, ses attachés de presse nous ont organisé un chaleureux pot où nous avons pu échanger sur le succès de son nouveau film.
À seulement 27 ans, Lukas Dhont remporte la Caméra d’Or au Festival de Cannes pour son premier film Girl. 4 ans après, il revient sur la Croisette avec son second long-métrage Close dans lequel il arpente l’amitié masculine lors de l’adolescence et lui vaut, à ex-æquo avec Des étoiles à midi de Claire Denis, le Grand Prix du Festival de Cannes 2022.
Rencontre avec Lukas Dhont
Généreux, solaire et humble, Lukas Dhont est un réalisateur que l’on aime tant pour ses films que pour ses qualités humaines.
En 2019, j’ai eu le bonheur de le rencontrer pour la première fois grâce à l’Académie des César. Lorsque j’y travaillais encore.
Deux ans après et quelques confinements, c’est au Festival de Cannes, entre les magnums flamboyants de la Terrasse d’Albane, que nous nous sommes fortuitement retrouvés. Mais comme on dit toujours « jamais deux sans trois », cette fois-ci c’est dans un tout autre contexte que nos chemins se sont croisés à nouveau.
Comment te sens-tu en ce moment ?
Très bien ! Je suis à Paris pour le Dîner des Nommés organisé par l’Académie des César. Puis, je repars à Londres pour 3 jours dans le but de rencontrer la presse et répondre à quelques Q&A. Ensuite, je m’envole pour Los Angeles. J’y vais grâce à ma nomination aux Oscars. Je reste là-bas jusqu’au 15 mars.
Quelle a été ta réaction lorsque tu as appris ta nomination aux Oscars ?
Lorsque j’ai appris la nouvelle, j’étais à New York. Parallèlement, je savais que les garçons, Eden Dambrine & Gustav De Waele – qui jouent les rôles principaux de Close – regardaient la retransmission en direct dans leur salle de classe. Quand l’annonce est tombée ils ont sauté de joie. Je dois avouer que moi aussi ! Je vis cette aventure à travers les yeux de ces jeunes adolescents de 15 ans. C’est si beau.
À leur âge, je rêvais déjà d’être réalisateur et de partir aux Oscars. Je crois sincèrement que c’est un véritable cadeau qu’ils soient près de moi. Quand tu deviens « adulte » tu es très vite focalisé sur tes objectifs. Grâce à eux, je ne suis pas dans une quête de résultats. Leur fraîcheur me permet de vivre cet événement comme un parcours incroyable.
C’est important pour toi cette reconnaissance de l’industrie du cinéma ?
Oui, forcément ! Je n’y suis pas insensible. Je me sens surtout très reconnaissant. Je pense à tous ces artistes dont le travail n’est pas forcément reconnu. Par exemple, ma mère a réalisé durant des années des peintures magnifiques qui n’ont jamais été célébrées. Il existe tant de beauté et d’art dans ce monde qui méritent également cette lumière. C’est pour cela que je me sens très chanceux.
La critique t’encense. Tu sembles très proche de ton public. La fois où je t’ai croisé à Cannes tu avais toujours un regard très attentif aux retours des spectateurs. Pourquoi ?
Je pense aussi que rester en contact avec mon public, d’être ici, à Londres ou à Los Angeles, c’est quelque chose d’important. J’aime partir à sa rencontre.
Dans ce film, tout le monde peut y trouver son propre point de résonance. La sortie du film est à la fois ancré dans un contexte sociétal et politique dans lequel il existe une véritable révolution féministe mais il est aussi à contre-courant dans certains endroits. Par exemple, l’été dernier la Floride a mit en place la fameuse loi « Don’t say gay » qui bannit de parler d’orientation sexuelle à l’école jusqu’à l’âge de 9 ans. N’est-ce pas dangereux ?
C’est certain. Le 7 janvier dernier, un jeune adolescent de 13 ans, Lucas, s’est suicidé à son domicile. Il subissait du harcèlement au collège du fait de son homosexualité. Cette nouvelle me brise le cœur. Malheureusement, Lucas n’est pas un cas isolé.
En ce moment, je lis des livres sur les années 30. C’est très intéressant. À cette époque, on remarque que la liberté et la sexualité étaient de pairs. Malheureusement après la guerre cela a changé. Puis, cela est revenu avec les années 70. Qu’est-ce que cela montre ? Que les normes fluctuent en permanence et qu’on a raison de se méfier du patriarcat. Comme tu l’évoquais, la politique menée dans certains États des États-Unis est un très bon exemple avec les lois don’t say gay ou encore contre l’avortement.