Voilà près d’une décennie que le visage souriant et malicieux de Pablo Pauly éclaire nos écrans de cinéma et de télévision. Après des débuts dans des séries comme En Passant Pécho ou Les Lascars, Grand Corps Malade lui confie le premier rôle de Patients en 2017. Révélé aux yeux du grand public, Pablo Pauly dessine depuis une filmographie exigeante, ponctuée de rôles aussi comiques que dramatiques, mais résolument ancrée dans les grands troubles de notre époque. Son dernier film en date, A la Joie, une histoire d’amour au temps du Covid, en témoigne.
Bonjour Pablo, tu succèdes à Bastien Bouillon dans le rôle de parrain de la Fête du Court-Métrage, comment tu vois ton rôle de parrain ?
Je vais profiter de mon statut pour mater absolument tous les films (rires). L’intérêt du court-métrage, c’est qu’on ne va pas donner suffisamment d’argent pour faire un long métrage à un réalisateur qui débute, donc il faut passer par le court. Mais le prochain Paul Thomas Anderson existe là-dedans. Où est ce qu’il est ? Je ne sais pas encore, je ne l’ai pas encore vu, mais il est forcément là.Donc ça c’est chouette. Et surtout, j’espère pouvoir aider à la visibilité de cette belle fête !
Tu continues, même après avoir tourné de nombreux longs-métrages à tourner dans des courts-métrages. Qu’est ce qui te plait dans cet exercice ?
Peut-être l’absence de pression financière dans le court-métrage. C’est compliqué à monter, mais en tant qu’acteur, c’est quand même très chouette de pouvoir essayer plein de différents styles de films, dans différents styles de cinéma. C’est un peu une façon d’essayer des choses qui peuvent sembler très loin de moi.
A t’entendre, il y a quelque chose d’artisanal voire d’expérimental dans le court-métrage. Tu as des souvenirs particuliers de tournage ? Parfois, on a une image un peu rock’n’roll de ces tournages qui sont plus à l’arrache.
J’en ai fait un, Le Passage de la Nuit, de Julia Colin avec Rabah Nait Oufella. On tournait dans une station-service de nuit. Donc tout le tournage se faisait de nuit, au milieu de l’autoroute. Et ça, c’était très bizarre à faire. Le film était un petit peu spécial aussi, un film de genre. Ça c’était rock’n’roll. On en a fait un autre d’ailleurs qui participe à la fête du court-métrage qui s’appelle Duos, de Marion Defer, et ça, c’était fabuleux de pouvoir jouer deux personnages différents dans le même film. C’était nouveau pour moi mais vraiment très agréable.
Est-ce que tu as un court-métrage culte, que tu aimerais partager à nos lecteurs ?
Il y a Pixar qui faisait des courts-métrages avant la projection du long-métrage. Il y en a un qui s’appelle Borrowed Time, sur un père et un fils qui sont dans une calèche à l’époque des cow-boys. Et ça parle du temps qui passe et du fait qu’il faut apprécier le moment présent. Et je ne m’y attendais pas. Je me prends ça dans la tronche et je pleure. Mais c’est fantastique et c’est resté gravé dans ma mémoire.
Par ailleurs, on peut découvrir en ce moment gratuitement sur la plateforme d’ARTE un film pour lequel tu as eu le prix d’interprétation masculine au festival de La Rochelle, A la Joie, de Jérome Bonnell. C’est une histoire d’amour contrariée, au temps du Covid. Qu’est ce qui t’a attiré ce projet ? De revenir sur cette période du confinement ?
Moi j’ai vite mis la période du confinement à côté. C’était c’est la situation, c’est là où le film évolue, mais ce n’est pas le problème de Sam, mon personnage. Pour moi, c’est surtout une histoire d’amour. Le confinement nous permet narrativement d’appuyer un petit peu sur la peur de cette période, le côté anxiogène. Mais moi je n’ai pas voulu le prendre, parce que pour mon personnage, cette période, c’est une liberté à l’inverse du monde entier. Lui, il va rencontrer une nouvelle femme et il peut repartir à zéro.
C’est vrai que c’est une belle histoire d’amour, on ressent une vraie alchimie entre toi et Amel Charif. Comment vous avez créé ça, ce naturel ? Vous avez eu de l’impro ?
Je n’ai pas rajouté de scène ni rajouté de texte, mais Jérôme Bonnell et moi on a déjà travaillé ensemble… Il me connaît suffisamment bien pour comprendre que toute façon il n’a pas le choix, il sortira de ma bouche ce qui sortira et il me fait confiance. Donc ce n’est pas de l’impro au sens où je dois trouver plutôt quelque chose en plus. Et il me laissait vraiment faire et quand je partais un petit peu trop loin, il me ramenait sur terre.
En revanche, il y a quelque chose qui a dû être moins spontané, ce sont les scènes de sexe. Comment vous avez géré cet aspect du tournage, avec l’équipe et surtout ta partenaire de jeu ?
Je pense qu’il faut juste être humain et pas trop bête et parler avec son partenaire : parler de ce qui est possible. Où est la pudeur ? Où est ce que ça s’arrête ? Où est ce que ça commence ? Donc avec Amel, on a beaucoup discuté et je lui ai montré un film qui s’appelle Julie en Douze Chapitres, qui est merveilleux. Il y a des scènes de sexe dedans extrêmement crues, mais sans voyeurisme. On a cherché ça. Et du coup, une fois qu’on s’est dit les choses, on était plus fort ensemble. Les scènes, je trouve qu’elles se sont très bien passées, c’était pas du tout désagréable, alors qu’habituellement c’est quand même un exercice qui n’est pas dingue quoi. Se mettre tout nu devant 35 personnes et simuler l’acte sexuel, ce n’est pas la meilleure journée du tournage. Mais là, pour nous, c’était vraiment une scène comme une autre.
Au final, en filigrane dans tes choix en tant que comédien, on ressent une envie d’aller vers des sujets du quotidien, des questions sociétales : le handicap avec Patients, la question du genre avec Trois Nuits par Semaine, ou encore avec A la Joie la santé mentale…
Tu la mets devant toi, je crois qu’elle te freine énormément si tu la mets juste derrière toi. J’aime le cinéma de Cassavetes qui peut être extrêmement drôle et extrêmement puissant. C’est ça que je veux faire, c’est ça que j’aime. Donc allons explorer un peu tout ça. Le 3 avril sort mon prochain film, Et Plus si Affinités qui parle du temps qui passe dans un couple et de l’échangisme. Donc c’est une comédie considérée comme populaire, mais dans le sens noble du terme, c’est ce qui me plaît.