Entre sable et mouettes, Pablo nous raconte sa vision du jeu, ce qui le motive et l’inspire, et comment son rôle de juré l’enrichit personnellement et en tant qu’acteur. Bienvenue sur cette plage de Normandie, bienvenue dans cet échange riche et spontané, bien qu’un peu frisquet…
Pour toi quelle est la singularité du festival Off-Courts de Trouville ?
Pour moi, c’est d’abord le lien entre le Québec et la France : pouvoir profiter de 45 films français et québécois. Je trouve ça assez fabuleux de découvrir le cinéma québécois en court-métrage, je ne connaissais pas.
Ensuite, il y a cette ouverture sur la diversité internationale, avec un nouveau pays invité à chaque édition.
Par ailleurs, à Off-Courts il y a ce côté humain très prononcé, l’équipe dans son entièreté est très cool, très accueillante, et ultra compétente. C’est à la fois amical et très professionnel.
Qu’est-ce qui t’a motivé à accepter le rôle de membre du jury au Festival Off-Courts cette année ? Qu’est-ce que cela t’apporte personnellement et en tant qu’acteur ?
J’ai accepté parce que j’aime beaucoup être jury (rire). Donner mon avis, c’est la partie que j’aime le moins finalement. La partie que je préfère c’est découvrir des films auxquels on n’a pas vraiment accès.
Le court-métrage, c’est vraiment un défi, parce que tu dois transmettre un message en 15 minutes. Du coup, en tant qu’acteur, tu t’enrichis de plein de nouvelles façons d’aborder ton jeu pour proposer des choses différentes.
D’un autre point de vue, et très égoïstement, je rencontre des réalisateurs, et d’autres professionnels du monde du cinéma avec qui je peux éventuellement travailler ensuite. Cette année à Off-Courts par exemple, j’ai particulièrement apprécié la musique d’un des courts, le compositeur est maintenant noté dans mon carnet d’adresses en gras.
En tant qu’acteur, que penses-tu apporter de spécifique à l’évaluation des courts métrages par rapport à d’autres jurés ?
La même chose que les autres, sur un autre angle : les réalisateurs se concentrent sur la réalisation, moi je vois les choses en tant qu’acteur, je suis très focus sur le jeu. Par exemple, si le texte ne se démarque pas particulièrement, comment l’acteur le fait vivre ? Au-delà de la parole, le jeu ça se passe dans le corps aussi, et cette année l’acteur de Suleyman, Moustapha Mbengue, m’a vraiment impressionné, il fait passer énormément à travers son corps, son regard.
Il a d’ailleurs eu le prix de l’interprétation ! Sur le même angle, chez RTC, on avait adoré Adam Bessa dans Les Fantômes de Johnattan Millet qu’on a découvert au Festival de Cannes cette année.
Ah oui, je l’ai vu, j’ai beaucoup aimé. Typiquement, très peu de paroles, c’était magnifiquement interprété.
As-tu trouvé des différences singulières, ou encore des points de rencontre, entre les productions françaises et québécoises ?
Le point de rencontre, c’est définitivement le cinéma, un film est un film. On s’en fiche du continent, de la langue, ce qui prime ce sont les émotions et ça, ça se retrouve de manière égale, que ce soit réalisé au Québec ou en France. Je n’ai pas identifié de sujet particulier pour la France ou le Québec, mais c’est vrai que dans les films québécois, sans surprise, on retrouve ces cadres de grands espaces vraiment propres au Canada.
Est-ce que tu souhaites souligner un film qui t’aurait particulièrement marqué ?
Hello Stranger, réalisé par Amélie Hardy, dans la sélection Québec. J’ai trouvé ce film qui mêle la fiction et le documentaire, incroyable ! C’est un film qui m’informe beaucoup, c’est le rôle du documentaire selon moi, mais sans me dire jamais comment penser.
Autant, dans la mise en scène, que dans son écriture, que dans le jeu… la photographie était sublime aussi, vraiment ce film-là, je n’ai rien à redire, il est fantastique. Ça et Les Belles Cicatrices, de Raphaël Jouzeau. Un film sublime, plein d’idées, peu dans la démonstration. Pour moi, ces deux-là ressortent très fortement de la sélection.
Quel regard portes-tu sur la spécificité du court ? Penses-tu que sa concision puisse apporter une force particulière par rapport aux longs ? Comment saisir cette force ?
Pour moi, c’est obligé qu’il y ait un côté vif dans le court métrage, pour qu’il puisse nous saisir, sans pour autant plonger dans le film « coup de poing » non plus. Quand tu n’as que 15 min pour faire passer un message, il faut être précis. Je pense que tu peux aussi réussir un court contemplatif, mais à ce moment-là, il faut être capable de faire naitre une photographie vraiment remarquable, doublée d’un sujet fort.
As-tu des conseils à donner à de jeunes réalisateurs ou de jeunes comédiens qui voudraient se lancer dans un court ?
Être curieux, ne pas s’arrêter à un seul type de film, de lire toujours et plein de choses différentes. Des essais, des romans, des nouvelles. Ne pas s’édicter de vérité, ne pas être sûr des choses et toujours essayer. S’ouvrir d’absolument de tout, profiter de l’omniprésence de l’art pour s’enrichir.
Tu vas au musée, toi ?
Ah, oui, j’y vais très souvent. Dernièrement je suis allée visiter la Fondation Maeght à Saint-Paul-de-Vence, à côté de Nice. Récemment je suis aussi allé faire un tour au musée Chagall, les vitraux y sont incroyables, c’est un art qui te dépasse. J’ai beaucoup aimé Turner cet été aussi, c’était sublime. Ça me fait penser, j’ai un professeur de théâtre qui m’a dit, un acteur c’est comme un chercheur d’or…
Grand Corps Malade !
(rire) Oui, mais avant Grand Corps Malade c’était, Arthur H ! En fait, tu mets les mains dans la boue, tu ramasses, tu ramasses, et à un moment donné, tu vas trouver une pépite. L’art, c’est être curieux, il faut essayer.
Tu parles finalement d’audace.
L’audace c’est essentiel. Tu ne peux pas faire sans l’audace.
Merci beaucoup, Pablo, c’était un plaisir de passer un moment avec toi.
Merci à vous, maintenant, allons nous réchauffer !