Dans le cadre de son rôle de juré pour le Filmoramax, festival 100 % consacré au court-métrage, le chanteur de Like a Hobo nous a accordé un moment privilégié autour d’une jolie table ronde.
Une discussion colorée autour des jeux de reflets entre cinéma et musique. Ce fut aussi l’occasion de flasher sur les derbys en cuir blanc de notre photographe Léa Ghirardotti, de nous faire pratiquer le franglais, et de recueillir quelques conseils pour trouver sa voie(x) d’artiste.
Merci de nous accorder ce temps Charlie, c’est un plaisir de te rencontrer ! Tu es britannique, mais tu habites dans le Sud de la France si je ne m’abuse, alors en français ou en anglais ?
Essayons en français !
Si tu avais un mot pour circonscrire la singularité du Fimoramax ?
Émergence.
C’est un festival qui s’intéresse à ce qui n’existe pas déjà dans l’industrie du cinéma. Ce qui les motive, c’est vraiment de découvrir des talents nouveaux. Célébrer une créativité neuve : c’est ça le plus important pour le Fimoramax.
Qu’est-ce qui t’a motivé à accepter ce rôle de membre du jury au Filmoramax ?
La possibilité de plonger dans cette créativité, déjà, et puis, il faut dire que j’avais envie de vivre quelque chose de neuf, d’en dehors de mes activités musicales qui s’enchaînent comme sur… a conveyor belt, how do you say that in French ? Là où tu mets tes produits au supermarché… un tapis roulant ! (rire) : écrire, enregistrer, tourner, et recommencer.
Un peu de fraîcheur ?
Oui, voilà ! Voir des choses nouvelles, rencontrer d’autres personnes, découvrir des talents avec qui j’aimerais collaborer, parce que j’adore aussi composer pour le cinéma et le théâtre.
Oui, j’allais y venir, tu es musicien-compositeur et tu as notamment participé à la BO de Lullaby (for Pi), quel regard spécifique penses-tu apporter au jury, par rapport aux autres jurés qui se consacrent au monde du cinéma ?
L’équipe de Filmoramax – Arnaud Mizon, Baptiste Brun et Patrice Révaux – m’a proposé ce rôle parce qu’ils appréciaient ma musique, et ils ont mentionné que ce qui les séduisait le plus, c’était son côté cinématique. Et c’est vrai. J’ai toujours écrit avec un oeil cinématique. Je vois la chanson en image avant de pouvoir l’écrire.
Tu visualises d’abord des images avant de construire ta mélodie ?
Oui, pour moi, la musique, le cinéma et la peinture fonctionnent de la même manière : au cinéma, on peint avec la photographie, en musique on peint avec des sons, des accords et des notes.
En e]et, j’imagine que ton expérience du monde de la musique apporte un nouveau regard à un jury autrement essentiellement ancré dans le cinéma. As-tu eu l’occasion de ressentir cela à l’occasion des discussions entre jurés ?
Nous verrons cela au moment de la délibération ! Je pense que j’apporte une vision diOérente pour deux raisons. D’abord, tu l’as dit, je viens du milieu de la musique avant tout, mais pas seulement : je suis aussi britannique (rire). Mon oeil diffère de l’oeil francophone. Il me semble que cet aspect est très important et qu’il peut offrir de nouvelles clefs de compréhension à un film.
Tu as hâte de participer à cette délibération ? Comment l’abordes-tu ?
Oui, j’ai hâte de voir de quelle manière on ne sera pas d’accord (rire) ! C’est important de ne pas être d’accord ! C’est la raison d’être d’un jury. L’essentiel, c’est de savoir où l’on s’accorde unanimement et de définir ensemble les critères qui établiront la qualité d’un film.
Et de trouver, de questionner : pourquoi ces critères-là ?
Oui, c’est aussi un travail de recherche de saisir ce qui fait qu’un film est percutant, ou non.
Et selon toi quels devraient être ces critères ?
Pour moi, c’est d’abord le message : est-ce que le message qui a voulu être transmis est intéressant ? Ensuite, pour habiller ce message il y a la photographie, les effets visuels et musicaux qui sous-tendent ce message et permettent de le transmettre de la bonne manière. Dans mes chansons, c’est pareil, je me demande comment la musique, la manière dont j’utilise ma voix, etc. va servir le message que je souhaite transmettre.
Y a-t-il des thèmes ou préoccupations récurrents que tu remarques dans le travail de la jeune création cinématographique ?
C’est une bonne question à laquelle il est diOicile de répondre de manière immédiate et définitive, mais il me semble que la réflexion autour de l’identité est récurrente. Notamment la façon dont un traumatisme forge une identité et comment on peut s’en guérir pour reprendre le contrôle de son existence.
Nous avons une forte communauté de jeunes artistes, as-tu des conseils à donner à des musiciens, compositeurs pour le cinéma, ou non, à des jeunes créateurs en début de carrière ?
Don’t be afraid.
Je pense qu’il faut avoir l’audace et la curiosité d’explorer des choses très différentes pour trouver sa voie. Selon moi, il n’y a qu’une seule manière de le faire : ne jamais se fermer de portes ni s’enfermer dans des idées préconçues. Parfois, un mauvais film est un excellent terrain d’apprentissage ; on ressort souvent d’une mauvaise expérience en ayant appris beaucoup sur le métier, mais aussi sur soi. Rencontrez, travaillez avec de nombreuses personnes jusqu’à ce que vous trouviez celles qui partagent et portent votre voix !